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Madagascar est dans l’œil du cyclone, au propre comme au figuré. Le pays est effectivement sous la menace d’une catastrophe climatique  générée par les éléments de la nature en train de se déchaîner en ce moment, mais il est également sur le point de se déliter sur les plans économique et social. Les malheurs qui s’abattent sur les populations les plus vulnérables de la société malgache n’engendrent pour l’instant  que des récriminations et ne débouchent sur aucun mouvement de révolte coordonné. Le spectacle de ces dizaines de milliers de pauvres gens qui s’entassent dans ces tentes mis à leur disposition interpelle certainement la conscience des autorités malgaches, le président de la République et le Premier ministre en tête, mais l’impuissance qu’elles manifestent devant  la souffrance des sinistrés montre la gravité de la situation. Ces derniers sont condamnés à endurer stoïquement ces épreuves qui s’abattent sur eux. Les paroles de réconfort  qu’a adressées le chef de l’Etat aux personnes réfugiées à l’abattoir d’Andohatapenaka  n’amoindriront certainement pas l’inconfort des lieux où ils sont parqués. Cette souffrance qui est en train de s’accumuler ne s’exprime  que « mezzo voce », mais elle pourrait se transformer en mouvement de colère violente si des esprits malintentionnés venaient à l’attiser. Nous ne sommes heureusement pas arrivés à ce stade, mais le climat est de plus en plus délétère.

Madagascar dans l’œil du cyclone au propre comme au figuré

Sur le plan économique, la situation est tout aussi peu reluisante. Ce sont des pans entiers de l’économie nationale qui sont actuellement sinistrés. Les conditions climatiques qui ont régné depuis le début de l’année ont mis à mal les outils de production et dégradé totalement  les infrastructures qui n’étaient déjà pas en très bon état. Les opérateurs économiques sont en train d’évaluer les pertes qu’ils subissent, mais ils savent que leur secteur est, lui aussi, dans une zone de turbulence qui risque de faire énormément de dégâts. Pour eux, les pertes se chiffrent en centaines, voire en milliers de milliards d’ariary qui ne pourront plus être récupérés. Pour remonter la pente, il faudra beaucoup d’efforts et énormément d’argent. Le retour à la situation antérieure ne se fera pas avant longtemps. Les conditions économiques n’étaient pas déjà brillantes auparavant, elles sont maintenant catastrophiques. Dans ce contexte, les mouvements de revendication  de certaines catégories sociales surviennent de manière inopportune et peuvent devenir des foyers de tension qui risquent de perturber le bon fonctionnement de la société malgache. Les autorités sont dans une situation particulièrement inconfortable. Madagascar est bel et bien dans l’œil du cyclone, au propre comme au figuré.

Patrice RABE

Midi-madagasikara du 10 mars 2015.